Entre le guide et l’enquête, « Paris couche-toi là » est une plongée sans brassard dans le Paris des plaisirs, de l’érotisme, de la baise, du porno, du libertinage, de la jouissance, de la séduction… Bref, du sexe, peu importe son appellation. Camille Emmanuelle écrit depuis quatre ans sur la culture érotique et tient des chroniques régulières notamment dans le Plus du Nouvel Observateur et le Hufftington Post. Pendant un an, elle a enquêté, la tête dans les dessous sexy de Paris, pour nous faire découvrir près de 60 lieux de plaisir, de luxure ou de débauche. Des librairies, des clubs libertins, des hôtels, des bars de nuit, des soirées BDSM, des sex-shops, des love-shops, des soirées sextoys… Camille Emmanuelle a exploré soixante nuances du Paris sexy avec une question en tête : Paris est-elle toujours la capitale des plaisirs ?
La jeune parisienne de 33 ans se plaît à dire qu’elle joue la fausse ingénue. Oui, elle découvre ces lieux avec envie et curiosité, mais immergée dans la chose depuis plusieurs années déjà, son œil reste toujours critique et souvent engagée. Nous avons rencontré cette sémillante jeune femme à la terrasse d’un café parisien. Avec elle, nous avons parlé de ses coups de cœur ou évoqué ce qui avait piqué notre propre curiosité.
L’appel à la luxure des portes cochères de Pigalle
« Je voulais dire dans ce livre que Paris est en elle-même un terrain de jeu érotique. » Et puisque l’érotisme se trouve aussi là où on ne l’attend pas, Camille Emmanuelle emmène son lecteur dans ces « renfoncements providentiels », les portes cochères de Pigalle et lui offre même un aperçu de ce qu’elle-même a pu y vivre… L’exploratrice décline toutefois toute responsabilité si vous vous faites choper pour attentat à la pudeur sous les libidineuses portes cochères.
Pigalle, c’est un quartier qu’elle connaît bien et qui, malgré de profondes mutations, reste le symbole du plaisir à Paris. « Les bars à filles se transforment en bar à hispters et les sex-shops se transforment en love-store. Pigalle a changé, mais garde cette atmosphère particulière. Et les murs ont une histoire, celle des lieux de luxure, des clubs libertins et c’est en soi excitant. Et Pigalle, c’est la mixité sociale, c’est aussi ce qui rend ses nuits si folles, tout le monde s’y croise. »
Se laisser surprendre au Crazy Horse
« J’ai adoré le Crazy Horse. C’est un vrai coup de cœur. En général, dans les cabarets classiques, je m’ennuie. Pour moi, le Crazy Horse, c’était un lieu pour touristes. Oui, il y a des touristes. Oui, les danseuses ont un corps très normé, mais j’ai pris une grosse claque visuelle. C’est magnifique, drôle, sexy et très contemporain. » Sous réserve d’avoir envie de passer un peu de temps avec des nantis américains et japonais, le show de Philippe Decouflé semble valoir le coup, même pour un Parisien blasé.
La « pornésie » ou comment faire rimer ma mie avec sodomie
Le Paris sexy peut aussi être intello. Camille Emmanuelle en a fait la savoureuse expérience à la terrasse du Petit Trianon avec Pendy Offmann, un dandy au look so 1900. Il promène sa barbichette dans le Tout-Paris pour déclamer de la poésie porno. « C’est tout ce que j’aime : le mélange de l’élégance intellectuelle, culturelle avec des choses qui parlent vraiment de cul. Clamer fellation en pleine terrasse à 17 heures, c’est vraiment drôle. Et plus excitant que des fleurs ! » Avec un mot pour point de départ, le poète pornographe concocte ses vers en dix minutes et les offre à tous. Même les plus pudibonds.
Nager nu comme un ver à la piscine Roger le-Gall
Une fois par mois, pendant trois heures, cette piscine municipale du 12e arrondissement se transforme en piscine naturiste. « C’est très agréable de nager nue. J’ai trouvé l’expérience plutôt drôle et sympathique. Par contre, j’étais la seule femme, c’est un lieu de rencontre gay. » Camille Emmanuelle elle, au moins, a fait ses longueurs, même nue. Les autres ont plutôt passé leur temps à discuter au bout de la ligne. Et sans se tripoter. Toute attitude sexuelle équivoque étant formellement interdite !
Dormir ou ne pas dormir, mais à l’hôtel
Pour elle et son propre plaisir, c’est sans doute les escapades à l’hôtel qui l’ont le plus émoustillée. « On donne rendez-vous à son amoureux. On y pense toute la journée, c’est très excitant. On se retrouve le soir dans une ambiance de désir. Ce n’est pas un truc qu’on fait quand on est parisien pourtant, c’est génial ! » En connaisseuse, Camille Emmanuelle conseille à son lecteur de vivre cette nuit ou cette journée ou ce cinq à sept ou cette petite heure de luxure le lendemain d’une soirée avinée « propice aux joies du sexe ». L’hôtel Edgar est son coup de cœur, où elle a passé avec son amant une nuit de folie dans une chambre carrément « pornographique », rien que ça ! « Et on se dit qu’on l’aime cette ville… et qu’elle nous fera toujours bander. »
Le mardi, c’est permis !
Et qu’est-ce qui l’a le plus amusée durant cette année de chaude déambulation ? « Un jour, j’ai découvert qu’il y avait un hammam-sauna libertin qui organisait des brunchs le mardi matin. Un mardi matin, à poil en paréo, à manger un croissant avec un couple tout nu, c’est là que je me suis dit que je faisais vraiment un drôle de métier ! » C’était au Moon City, boulevard de Clichy ou comment déguster son croissant avant de s’adonner aux joies du sexe, ou du voyeurisme. Paris sexy, ce n’est pas que la nuit. Paris sexy, c’est 24 heures sur 24.
Mais alors, Paris est-elle toujours la capitale des plaisirs ? « Oui, Paris est toujours la capitale des plaisirs, mais tout est question de regard. Pour ceux qui y vivent, Paris est une ville dure, le métro pue et les gens sont agressifs, mais on peut y vivre sa sexualité, qu’on soit homo, hétéro, BDSM, libertin, de manière libre et joyeuse. »
> Paris, couche-toi là, Camille Emmanuelle, Editions Parigramme, avril 2014.