Le festival show case By:Larm, littéralement « ville » (By) et « bruit » (Larm) en norvégien, est basé depuis quatre ans à Oslo.
Après plus de dix ans d’errance à travers le pays à la recherche du concept précis, By:Larm s’impose aujourd’hui comme le parfait tremplin de la musique nordique et attire, en plus des festivaliers norvégiens, des professionnels du monde entier, journalistes, programmateurs, labels, qui viennent découvrir ceux qu’ils soutiendront demain à l’international. Cette année, le festival accueille aussi le premier Music Nordic Prize, récompensant le meilleur album nordique de l’année. Et c’est à l’Islandais Jonsi, évadé de Sigur Ros, que le prince Haakon Magnus remettra le prix, pour son album Go.
Des groupes venus de tous horizons
Proche des Transmusicales de Rennes (Ille-et-Vilaine) ou du texan SXSW dans sa forme, les 17, 18 et 19 février dernier, le festival a monté son chapiteau principal au centre d’Oslo et investi vingt-deux bars, théâtres, salles de concert et clubs de la ville dans un rayon de moins d’un kilomètre. Pendant trois jours, 180 groupes s’y produiront, certains à plusieurs reprises. La majorité des groupes sont norvégiens, certains suédois, d’autres islandais, danois ou finlandais.
Ici la dictature du cool ne s’applique pas. Pas d’homogénéité de style, la programmation d’excellente qualité n’est régie par aucune règle financière. En effet, la majorité des artistes n’en sont qu’aux balbutiements de leur carrière. Il n’y a pas de tête d’affiche. Tout le monde est logé à la même enseigne : un set de trente minutes pour convaincre.
Logés à la même enseigne
Cheveux hirsutes, gueules enfarinées, on commence la journée en faisant la queue devant la machine à café. Le petit déjeuner est un des moments les plus atypiques de ce genre de rassemblement pour les professionnels et les artistes étrangers, logés au même hôtel. Tout le monde lit le journal du festival imprimé pendant la nuit, on s’échange des infos, des bons tuyaux. Et on écoute innocemment la conversation des voisins, mais surtout on se dit qu’on a bien fait de descendre parce que les gaufres sont délicieuses.
Après une journée dédiée au speed meeting frénétique entre artistes et autres acteurs de la profession, une balade sur les bords d’une mer gelée et au parc Vigeland, le vrai marathon commence. Les studieux auront bien sûr préparé leur parcours en amont. Vers 19 heures, le top départ est donné aux festivaliers d’hiver qui sillonneront inlassablement les rues d’Oslo en quête du son qui les réchauffera au moins pour trente minutes. Une consommation d’alcool non modérée n’est pas recommandée : les trottoirs glacés d’Oslo appellent à une totale maîtrise de soi.
Morceaux choisis de l’édition 2011
> Jeudi
Sleep Party People, en deux minutes, hypnotisent et dégongèlent les quelques festivaliers qui ont décidé de commencer leur tournée et leur festival à Stratos. Stratos est un des très chouettes club de la ville. Sur le toit du parti travailliste, portes vitrées et terrasse surplombant la ville. On se croirait dans un de ces restaurants perchés d’Istanbul, impossible à trouver sans un bon guide.
Les Danois de Sleep Party People rentrent sur scène habillés tout en noir et enfilent rapidement des masques de lapin à grandes oreilles. Des draps blancs sont posés sur quelques instruments. Leur musique, empruntant au shoegaze de my Bloody Valentine et Slowdive, et la voix passée aux effets du chanteur produisent un set terriblement moderne, évident et envoûtant. By:Larm commence très fort !
Un petit tour en ville et nous revoici à Stratos, pour le concert de LCMDF, Le Corps Mince de Françoise. Le set électro-pop des deux soeurs finlandaises est simple et efficace. Elles maîtrisent totalement leur espace, leur enthousiasme est contagieux. On bouge et on s’amuse sans complexe. Elles présenteront leur album Love and Nature en France, fin mars, à l’occasion du festival les Femmes s’en mêlent. Interview à venir dans Citazine.
> Vendredi
Pour la deuxième soirée du festival, on change de rythme, en s’installant confortablement dans l’incroyable Kulturkirken Jakob, une église fondée en 1880. Ce soir s’y déroule le premier Nordic Music Prize, un des événements de l’édition 2011. La soirée s’articule autour de trois concerts de trente minutes, encore, et de la remise du prix. Trois des douze nominés se produisent sur scène : l’Islandaise Olof Arnalds, la Norvégienne Susan Sunford, et les Suédois Dungen nous offrent un plateau en or.
Olof Arnalds, à ne pas confondre avec son tout aussi talentueux cousin Olafur Arnalds, est rayonnante et drôle, seule avec sa guitare. Son folk et son rire résonne dans l’église, le public l’accompagne en « lalala » sur la chanson Innundir Skinni.
Susanne Sundford provoque, elle, un tout autre effet. Comme si la voix provenant de cette mystérieuse silhouette assise au piano, soutenue par des arrangements et des musiciens pointus, s’adressait intimement à chaque personne présente. Presque mystique, ce concert laissera une question flottée dans l’air, quelle est donc l’étrange pouvoir de cette demoiselle ?
> Samedi
Dernière soirée, sans programme. Le bouche à oreille des journées précédentes fonctionnant à merveille et les festivaliers norvégiens plus nombreux un samedi soir, on a parfois des difficultés à rentrer dans des salles prises d’assaut. Deux des grosses affluence du soir, symptomatique des groupes dont on entendra parler, les concerts des norvégiens Honningbarna et Death Crush.
Honningbarna nous prend par surprise. Rien d’étonnant pourtant qu’un si jeune groupe joue du métal. Le genre est une véritable religion en Norvège. Ce qui détonne, c’est le style du chanteur. Petit bonhomme, bien peigné, en habit du dimanche, alternant violon, violoncelle, et vociférations norvégiennes. Le contraste et l’énergie sont irrésistibles.
Death Crush, dont le journal lui consacrait deux pages le matin même, rassemble tous les curieux du festival. Ecrasés au fond d’une salle archi pleine, l’enthousiasme du public arrive jusqu’à nous. On devra s’en contenter, puisqu’on ne voit pas la scène. Déjà programmées au festival texan SXSW, on retrouvera sans aucun doute ces femmes à vif et à guitare sur une scène française cet été. A suivre.
C’est sous le chapiteau principal et devant les Concretes que nous terminerons cette édition 2011. Deux idées en tête : oui on reviendra et mince ils sont quand même très forts ces Scandinaves, forts d’une musique honnête, moderne et mature.
Photo d’accueil : le groupe Honningbarna lors de son concert à By:Larm, par Helge Brekke.
Découvrez l’interview de LCMDF, réalisée par Citazine.