Nouveau départ
Benjamin Mee (Matt Damon), père de famille veuf depuis six mois – et loin d’être remis de la disparition de sa femme – plaque le journalisme pour s’installer à la campagne avec ses enfants et démarrer une nouvelle vie. Le titre original, We bought a zoo ("Nous avons acheté un zoo") et celui choisi par le distributeur français, Nouveau départ, suffisent à résumer le programme du nouveau film de Cameron Crowe. Ou comment une famille va se reconstruire en même temps qu’elle prépare la réouverture d’un parc animalier à l’approche de l’été.
Le scénario déroule ses bons sentiments et ses passages obligés (des amourettes d’ados à la réconciliation père/fils), sans laisser la moindre place à l’inattendu. Même si l’ensemble est des plus prévisibles, une réelle émotion affleure par moments – les derniers plans sont bouleversants – Crowe ayant suffisamment de métier et de subtilité dans le regard pour ne pas alourdir le propos avec une sensiblerie étouffante. Cependant, le film, inspiré d’une histoire vraie, perd de sa cohérence lorsqu’il tente de glisser le personnage de l’inspecteur, chargé de vérifier que la structure est bien aux normes, dans l’habit du méchant de cinéma. Un choix discutable (qu’est-ce qui le motiverait à mettre des bâtons dans les roues de l’équipe du zoo?) et dont les accents caricaturaux, piétinant dans un ridicule outrancier, font tâche.
Film à la morale typiquement américaine ("Quand on veut, on peut" ; "Il suffit de 20 secondes de courage"…), il s’inscrit dans la lignée de films récents (Il n’est jamais trop tard, Tom Hanks, 2011 ; The Company men, John Wells, 2011) mettant en scène des Américains ordinaires amenés à prendre leur destin en main (parce que la crise économique ou, dans le cas de Nouveau départ, une crise intime, née de la difficulté de faire son deuil, les y a contraints) et à repartir de zéro, avec succès. L’optimisme revendiqué laissant ici moins de prise aux attaques cyniques puisque labellisé "true story"
L’enfant d’en haut
On reste au grand air, mais on part pour la montagne suisse avec L’enfant d’en haut (2). Soit l’histoire de Simon (Kacey Mottet Klein), 13 ans, qui vit avec sa sœur (Léa Seydoux) dans une tour HLM et prend tous les jours le téléphérique pour arpenter la station de sports d’hiver. Il n’y va pas pour s’amuser mais pour voler les skis, lunettes, gants et même, casse-croûtes des vacanciers. Son petit trafic est bien rôdé : il sait où ce matériel trouvera preneur et pour quel prix. Avec l’argent, il achètera « des pâtes, du papier toilettes, des trucs » qui les aideront à subsister, lui et sa sœur.
Quatre ans après son premier film, Home (avec Isabelle Huppert et Olivier Gourmet), Ursula Meier revient avec cette chronique assez pessimiste d’un gosse livré à lui-même. Malgré son jeune âge, Simon veille bien davantage sur sa frangine, pourtant jeune adulte, qu’elle ne prend soin de lui. Une inversion des rôles qui prend un tour vertigineux lorsque le secret qui les unit se révèle en cours de route.
Ursula Meier, ne s’appesantit pas sur le pathos de la situation, animant Simon, gamin qui a grandi trop vite, d’une débrouillardise et d’une gaillardise qui en font un personnage attachant, parfois drôle, ne cédant jamais au découragement.
Les scènes qui ouvrent et ferment le film sont les plus admirables : sans aucun dialogue, elles laissent les images parler d’elles-mêmes. Ursula Meier confirme que le cinéma européen devra désormais compter avec elle.
> Nouveau départ, réalisé par Cameron Crowe, Etats-Unis, 2011 (2h03)
> L’Enfant d’en haut, réalisé par Ursula Meier, Suisse/France, 2011, (1h37)