La crise et la simplicité

La crise et la simplicité

La crise et la simplicité

La crise et la simplicité

Au cinéma le

Nouvelle année, nouveau rendez-vous cinéma sur Citazine. Chaque semaine, Fabien va nous faire partager son humeur sur les films sortis en salles. Installez-vous, ça tourne.

Comme un signe des temps, la crise investit les films à l’affiche de cette première semaine de sorties de l’année. Take Shelter[fn]Take Shelter, Etats-Unis, 2011, réalisé par Jeff Nichols (1h58).[/fn], premier jalon cinématographique de 2012, présente un couple en crise sur fond d’Amérique engluée dans la morosité économique. « Dans ce contexte, une minute d’inattention et tu es mort », se voit avertir, en substance, Curtis LaForche, père de famille bien trop obnubilé par l’arrivée d’une tempête destructrice qu’il pense imminente pour tenir compte du conseil. Dans ce rôle, Michael Shannon, qui avait déjà frayé avec la folie dans Bug (W. Friedkin, 2006) ou Les Noces rebelles (S. Mendes, 2008), impressionne. Mais c’est surtout l’atmosphère paranoïaque, aux confins du fantastique, entretenant le flou entre potentielles visions prémonitoires et possibles hallucinations pathologiques, qui continue d’infuser dans l’esprit du spectateur après la séance. Une angoisse qui naît de l’incertitude. Avec la crise, on commence à connaître.

 

En France, c’est le trio crédit-endettement-galère, qui se déploie, telle une spirale infernale, dans Une vie meilleure[fn]Une vie meilleure, France, 2011, réalisé par Cédric Kahn (1h50).[/fn], de Cédric Kahn. Louise Wimmer, héroïne du premier long métrage éponyme[fn]Louise Wimmer, France, 2011, réalisé par Cyril Mennegun (1h20).[/fn] de Cyril Mennegun, elle, a déjà presque tout perdu. Ne lui reste plus que sa voiture, dans laquelle elle passe ses nuits. Mennegun vient du documentaire et cela se ressent. Il compose son beau portrait de femme par une succession de scènes significatives jamais excessivement chargées en pathos ou en spectaculaire. C’est avec justesse qu’il colle aux basques de cette femme qui lutte pour ne pas sombrer dans l’exclusion. Sa caméra la suit de son boulot de femme de ménage dans un hôtel jusqu’aux douches de stations services devenues salles de bains de fortune et capte ses stratégies de débrouille pour économiser quelques euros.

Corinne Masiero, aperçue dans de nombreux films et téléfilms, trouve enfin un rôle à son envergure. La Louise Wimmer qu’elle compose ne fait jamais pitié ; au contraire, on admire la dignité de cette femme pour qui l’horizon d’une barre HLM est la perspective de lendemains meilleurs. Si Mennegun n’élude rien de la galère, il choisit de rester optimiste. De l’espoir, dans la France de 2012, c’est toujours ça de pris.

Le rayon de soleil de la semaine vient d’Argentine. Les Acacias[fn]Les Acacias, Argentine, 2011, réalisé par Pablo Giorgelli (1h25).[/fn], reparti du dernier Festival de Cannes avec la Caméra d’or, raconte le voyage, entre le Paraguay et Buenos-Aires, d’un chauffeur routier qui a accepté d’emmener dans sa cabine une jeune mère et son bébé. Le road movie emprunte progressivement la voie du transport amoureux. Là encore, le spectaculaire est aux abonnés absents, mais cette chronique d’une rencontre a quelque chose de profondément émouvant. Voir ces deux adultes, engourdis par la gêne, sortir peu à peu de leur mutisme, tenter chacun de faire un pas vers l’autre, et se révéler un peu l’un à l’autre, est un spectacle des plus touchants. Et pourtant, d’une simplicité confondante. Mais que cette simplicité est cinégénique !

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