Depuis les derniers évènements de Dragons 2 (2014) – lire notre chronique -, Harold est devenu le responsable du village de Beurk où vivent en osmose les vikings et leurs dragons apprivoisés. Le jeune homme savoure la réalisation de son idéal auprès de la téméraire Astrid et de son ami à écailles Krokmou qui a su également s’imposer et commande désormais tous les autres dragons. Mais deux évènements inattendus vont soudainement tout remettre en question. Krokmou rencontre un dragon femelle de son espèce — surnommée Furie Eclair par Astrid — qui ne le laisse pas indifférent et l’éloigne peu à peu d’Harold.
De son côté, le jeune homme doit également faire face à un chasseur de dragons qui menace le village et souhaite s’en prendre particulièrement Krokmou, individu qui lui permettrait de soumettre tous les autres dragons à sa volonté. Pour éviter le pire, les habitants de Beurk et leurs dragons sont obligés de fuir. Ils quittent le village pour un voyage vers un monde caché légendaire où les dragons vivraient en liberté. Avant que tout soit changé à jamais, vikings et dragons vont devoir se battre une dernière fois ensemble pour leur liberté.
Chaud sur les détails
Pour mettre un point final à la saga sur grand écran, Dean Deblois n’a pas lésiné sur les moyens. Encore plus impressionnant que le second opus, Dragons 3 en met plein la vue avec des séquences mettant en scène un nombre impressionnant de détails et de personnages dans un même plan. Une profusion encore jamais vue et pour cause, elle n’était tout simplement pas possible techniquement il y a encore quelques années. Avec près de cinq ans entre chaque film, les avancées techniques sont remarquables et ce dernier opus impressionne particulièrement.
Certaines scènes du film font appel à plus de 100 000 images numériques pour un seul plan ce qui a nécessité des puissances de calcul très importantes pour animer le tout. Les équipes ont également pu bénéficier de Moonray, une petite révolution dans le domaine de l’animation. Cet outil permet l’éclairage des animations en temps réel en reproduisant dans une scène le jeu d’ombre et de lumière qui existerait dans le monde réel.
Ces nouvelles technologies ont permis de repousser encore plus loin les limites de l’animation numérique pour un rendu toujours plus saisissant dont la finesse du moindre détail peut être admirée sur grand écran. En 2010, le premier volet de la saga ne pouvait pas montrer à l’écran plus de huit dragons dans une même scène au risque de faire planter le système qui générait les images.
Dans ce dernier opus, plus de 65 000 dragons sont présents à l’écran dans un ballet impressionnant lors d’une scène se déroulant à Caldera, le Monde caché qui leur sert de repère. Mais le succès de la saga ne saurait se réduire à une débauche d’images impressionnantes.
Amitié inconditionnelle
De plus en plus spectaculaire, la franchise — très rentable pour les studios Dreamworks — a établit, dès le premier film, un couple — Harold et son drôle de dragon Krokmou — qui a su amuser et émouvoir les spectateurs. Avec le succès, l’idée d’une suite a rapidement été envisagée et pour le réalisateur Dean Deblois.
Une trilogie était nécessaire pour développer les thèmes de la saga : l’altérité à travers la cohabitation pacifique entre les humains et les dragons, le courage, la famille, le sacrifice et l’amour, évidemment. La force de Dragons est d’avoir su faire mûrir ses personnages et notamment Harold confronté à de vrais dilemmes douloureux remettant en question ses convictions.
Désormais jeune homme, Harold a plus de poils au menton et la responsabilité de veiller sur le village mais c’est à travers le personnage de Krokmou que la question de la maturité et du basculement définitif à l’âge adulte se pose. Car si Harold a bien grandi, son dragon aussi et il commence à être titillé par les choses de l’amour.
En confrontant Krokmou à une magnifique dragonne de son espèce, Dragons 3 crée un parallèle amusant avec la relation ambigüe entre Harold et Astrid qui continuent à se tourner autour. Mais au-delà du touchant rapprochement entre les deux dragons c’est une révolution qui est en cours et va changer à jamais l’existence des vikings et de leurs dragons apprivoisés.
En tombant sous les charmes de la Furie Eclair, Krokmou redécouvre également son instinct animal qui l’éloigne naturellement de son ami Harold. L’amour, l’amitié et surtout le sacrifice sont les ressorts de ce dernier volet qui fait une nouvelle fois peser une lourde responsabilité sur les épaules d’Harold.
Et si son rêve de vie commune avec les dragons pour lequel il s’est toujours battu n’était au final pas une situation idéale ? Une remise en question courageuse pour ce dernier volet qui permet d’affirmer sans ambiguïté le message écologique sous-jacent qui a parcouru cette saga décidément très attachante.
Plus flamboyant que jamais, le dernier tour de piste d’Harold et Krokmou conclut avec intelligence leur parcours sur grand écran. D’une étonnante maturité, Dragons 3 achève en beauté la saga en refusant la facilité d’une fin heureuse trop évidente et en renforçant au passage le mythe des dragons. Nous savons désormais ce qu’il nous reste à faire si nous souhaitons en rencontrer un jour.
> Dragons 3 : le Monde caché (How to Train Your Dragon: The Hidden World), réalisé par Dean Deblois, États-Unis, 2019 (1h44)