Roman phare des années collège/lycée – il est régulièrement inscrit au programme – "L'Ecume des jours" était réputé inadaptable au cinéma. Michel Gondry a brillamment relevé le défi. Adepte des bricolages surréalistes et artisan du système-D, il signe un film facétieux qui comblera ses fans. Chaque plan déborde d'inventivité, d'originalité et c'est à la fois la force et la faiblesse de cette adaptation : l'ingéniosité mise en oeuvre émerveille, mais elle a tendance à étouffer l'émotion.
Ce n'est que lorsqu'il accepte d'abandonner ses images à la mélancolie et à la tristesse que Michel Gondry réussit à nous toucher au coeur. Gentiment foufou, souvent charmant et toujours inspiré, "L'Ecume des jours" n'est réellement convaincant que dans ses 20 dernières minutes qui nous donnent à voir autre chose que le traditionnel "Petit Gondry illustré". Les ultimes plans se parent d'une patine Nouvelle-Vague et l'obscurité finit par ronger tout l'écran.
Dans ses longs métrages précédents, notamment "Eternal Sunshine of the Spotless Mind" et "La Science des rêves", le réalisateur traitait, de la même manière, du chagrin en enroulant l'amertume et le tourment dans un emballage carton-pâte débordant de poésie. Mais jamais il n'avait fait preuve d'une telle noirceur. Les haters parleront de "clip interminable", mais il est dommage de cracher sur ce qui a été adoré. "L'Ecume des jours" étant du Gondry tout craché, ce n'est, après tout, qu'un simple retour à l'envoyeur.
> "L'Ecume des jours" de Michel Gondry, France, 2013 (2h05)