Nos pères, nos frères, nos amis, ces hommes violents qui nous ressemblent

Nos pères, nos frères, nos amis, ces hommes violents qui nous ressemblent

Nos pères, nos frères, nos amis, ces hommes violents qui nous ressemblent

Nos pères, nos frères, nos amis, ces hommes violents qui nous ressemblent
sortie en poche

18 décembre 2024

Ils sont nos pères, nos frères, nos amis… et ils sont aussi auteurs de violences conjugales. Le journaliste Mathieu Palain a passé quatre ans à enquêter sur ces hommes condamnés par la justice et contraints de participer à des groupes de parole. Un livre d’utilité publique, malheureusement trop parcellaire.

La parole des hommes violents, un angle mort

Mathieu Palain, romancier du réel Quatre ans à l’écoute d’hommes violents qui tentent de s’absoudre, à rapporter leur parole, leurs justifications. La perspective choisie par Mathieu Palain est inédite car la parole des hommes violents est un angle mort et on comprend mieux pourquoi : la plupart sont dans le déni. Des hommes qui commencent par clamer leur innocence, donc, minimiser ou refuser de reconnaître leurs torts. Certains vont amorcer une prise de conscience de leurs actes mais ils ne sont pas majoritaires.

J’ai beaucoup aimé que Mathieu Palain, auteur du remarqué Ne t’arrête pas de courir, se livre lui aussi, partageant son ressenti et son effarement face au déni et à l’ampleur du sujet. Il y a fait l’expérience de sa masculinité, interrogeant, en toute humilité, son propre rapport aux femmes. Sans doute a-t-il appris bien plus sur lui que son lecteur, car l’ouvrage, assez décousu, ne fait que constater et informer. Pas de chiffres, de statistiques, de contenu fouillé et précis comme peut l’exiger une enquête journalistique.

Il manque aussi, et Mathieu Palain le reconnaît volontiers, un aperçu de la violence conjugale dans les milieux privilégiés. Le livre de Mathieu Palain reste essentiel car le sujet est essentiel, et c’est pour cela qu’il mérite ses trois étoiles.

Machisme, masculinité et minimisation des violences

Un soignant donne une explication très intéressante quant au continuum de violence : la violence est un virus. Exposé, vous l’attrapez, et avez toutes les chances de devenir violent à votre tour, ou victime. Dans un couple, c’est aussi le lien qui fait que la violence s’installe, le lien entre deux êtres contaminés par la violence de leurs parents, de leurs proches, de leur enfance.
On apprend aussi que certaines femmes violentées sont jugées coupables pour avoir fait preuve de violence physique, et se retrouvent parfois contraintes de suivre ces stages – aux côtés d’hommes violents qui nient ou minimisent.  La double peine, donc.

 Un couple c’est comme un navire. Y’a qu’un seul commandant / ça arrive à tout le monde de péter un câble.

Mathieu Palain soulève peut-être ici le nœud du problème : que sont ces hommes, qui sans la colère se sentent réduits à si peu ?

Prévenir la violence

Mathieu Palain n’évoque pas de pistes de solutions, seulement ces hommes qui ne s’y retrouvent pas dans cette société telle qu’elle est. Quand la société crée des monstres ou des martyrs, c’est qu’elle ne peut pas ou on ne veut pas se poser de questions. « Si les hommes sont violents », dit Mathieu Palain, « c’est parce que nous les avons laissé faire ».

Jusqu’où doivent aller ces groupes de paroles ? La justice restaurative peut-elle « passer » dans le cadre des violences conjugales ? Des questions intéressantes qui auraient mérité d’être posées.

Nos pères, nos frères, nos amis de Mathieu Palain

252 pages
Date de publication
1 février 2024
Éditeur
Les Arènes
Page du livre sur le site de l’éditeur