"Adopte un jeune dip’"
Voici le titre d’un site-CV, conçu sur le même mode que le fameux site de rencontre Adopteunmec.com, créé en février par un jeune diplômé en marketing de l’EDHEC et de l’Université de la Sorbonne. Un parcours a priori sans fautes… Et pourtant. « J’en avais assez de recevoir, en réponse à mes candidatures, des emails du type ‘Malgré tout l’intérêt de votre profil’, explique Dorian, 23 ans. Je crois beaucoup au facteur chance dans une opération de recrutement. » Diplômé en décembre 2012, il a choisi de ne pas attendre que celle-ci lui tombe dessus, mais bien de la forcer en se démarquant des tristes CV qui doivent probablement inonder les bureaux, ou boîtes emails, de chargés de ressources humaines débordés. « L’idée m’est venue en plein footing avec un ami. Au départ, je voulais créer une web-série sur le mode de ‘Qui veut épouser mon fils ?’, avec des courtes vidéos de mes proches. Mais cela m’aurait pris davantage de temps que de rechercher un emploi.
J’ai donc pensé à Adopteunmec.com. On fait bien des ‘speed-dating’ pour trouver un emploi, alors pourquoi ne pas détourner un site de rencontres ? » Et l’initiative a fait mouche… Depuis deux semaines que son site est en ligne, une douzaine d’emails, assortis de propositions, lui sont parvenus. Rien n’est signé, il se donne encore quelques jours avant de faire un choix.
"Jeune diplômé en solde"
Si le jeune homme précise n’avoir aucune intention d’ordre « militant », son initiative ne va pas sans nous rappeler un autre « jeune dip’ » en recherche d’emploi, Yannick Miel, qui à 23 ans et un bac+5, s’était mis en vente sur Ebay pour 1 euro symbolique. C’était il y a quatre ans. Quelques jours plus tard, il montait un stand sur l’esplanade de la Défense "Jeune diplômé en solde, faites une offre". Habillé en homme sandwich, il distribuait son CV… Et c’est Martin Hirsch, à l’époque Haut-commissaire à la jeunesse, qui lui a proposé un CDD de quatre mois dans son cabinet.
« La première semaine, j'ai eu le numéro deux de l'Apec au téléphone en moins de 5 minutes, se souvient-il. Moi qui avais du mal à contacter Pôle emploi une semaine plus tôt… J'ai fini par baptiser mon téléphone du cabinet : ‘le téléphone magique’. » Après trois ans passé dans l’administration, et autant dans le collectif Génération Précaire qui défend les droits des stagiaires, il est aujourd’hui en poste. « Il ne faut jamais oublier que prospérité et galère s’enchaînent… Je conseille de toujours garder son sens de l’humour. »
Le détournement
Les détournements sont en effet de bons filons. Anne-Sophie Thomas, une jeune diplômée, parodiait en mai 2012 la série « Bref » pour présenter son parcours. Une vidéo qui a l’époque avait fait son petit effet.
Augustin Duval, lui, s’est inspiré en 2011 de Facebook pour mettre en ligne son CV interactif. Le jeune homme inspiré avait détourné une page classique de profil Facebook pour en faire un CV interactif, hyper-connecté et web 2.0 à souhait. MinuteBuzz, Canal +… ce CV malin avait su attirer l'oeil des médias sur le garçon sans emploi !
Un "mouton à cinq pattes"
Plus "artisanale", l’initiative de Charlotte n’a pas abouti à un véritable poste, mais n’en a pas moins fait mouche. « Je travaillais depuis trois ans dans la même entreprise, mais je voulais changer. » Un de ses amis lui a alors fait suivre une annonce, qui précisait qu'elle cherchait un « mouton à 5 pattes ». « Je n'avais rien à perdre. J’ai donc envoyé une lettre de motivation et un CV classique. Sauf que contrairement à mon habitude j'ai ajouté une photo… Mais pas n'importe laquelle ! J'ai trouvé un mouton dessiné sur le net et j'y ai rajouté une 5e patte. » Rendez-vous est pris quelques jours plus tard, le recruteur ayant été « séduit » par l’initiative… et son CV. « Très vite il m'a annoncé qu'il avait déjà trouvé sa perle rare, mais qu'il était prêt à m'aider dans ma recherche. Il m’a beaucoup mise en valeur, et c’est assez rare lors d’un entretien. » Tout comme les moutons à cinq pattes.
Acheter une affiche publicitaire
Et certains ne restent pas devant leur écran, comme ce fut le cas de ce jeune documentariste anglais, Adam Pacitti. En janvier dernier, il a été jusqu’à louer un panneau publicitaire, pour lequel il a dépensé ses derniers 500 livres. En sortant de la station Kilburn, dans le nord de Londres, vous pouviez lire le message suivant : « J’ai dépensé mes 500 dernières livres pour ce panneau. S’il vous plaît, donnez-moi un job. Employadam.com »
Courir, courageusement
Zineb Dryef, journaliste chez Rue89, a préféré une méthode plus directe encore. « En février 2007, je préparais les concours des écoles de journalisme, se souvient-elle. Je savais que plusieurs journalistes de Libération projetaient de créer un nouveau site d’information, et je vivais près de leurs locaux. J’ai fini par croiser Pierre Haski dans la rue… Et je lui ai couru après. Il était assez surpris. » Et l’initiative a été plus que fructueuse, puisque rendez-vous a été pris deux jours plus tard. « Il a considéré que toutes les bonnes volontés étaient les bienvenues. J’ai donc assisté aux prémisses de Rue89… Et j’y suis encore. »
Annonce : "Offre : demandeur d’emploi. Profil recherché : candidat culotté."