« Whiplash », la peur du batteur

« Whiplash », la peur du batteur

« Whiplash », la peur du batteur

« Whiplash », la peur du batteur

Au cinéma le 24 décembre 2014

Avec Whiplash, le réalisateur Damien Chazelle fait revivre à l’écran son éprouvant apprentissage de la batterie auprès d’un professeur exigeant l’excellence. Une œuvre fébrile et électrique qui frappe très fort.

Andrew (Miles Teller), 19 ans, rêve de devenir l’un des meilleurs batteurs de jazz de sa génération. Elève au sein du conservatoire de Manhattan, il s’entraîne avec acharnement pour attirer l’attention de Terence Fletcher (J.K. Simmons), enseignant féroce et intransigeant qui dirige le plus prestigieux des orchestres de jazz du pays. Lorsque celui-ci le remarque enfin, Andrew intègre la formation et doit se soumettre à une discipline intraitable qui lui fait repousser toujours plus loin ses limites.

L’apprentissage devient alors une lutte acharnée de chaque instant, les deux hommes s’affrontent dans un rapport de force ambigu, entre défiance et souffrance masochiste, avec pour but ultime la perfection. Un combat d’une intensité folle qui scotche le spectateur à son fauteuil, jusqu’au coup de baguette final.

Whiplash © Daniel McFadden // Ad Vitam Distribution

La cymbale qui emballe

La réalisation du cinéaste, à l’affut du moindre mouvement, est aussi viscérale que le lien entre le jeune élève et son gourou de professeur. Filmé comme une guerre dont les armes sont les instruments, Whiplash excelle à créer une tension palpable entre les deux protagonistes où se mêlent admiration et exaspération. Avec son montage nerveux, le cinéaste impose un rythme implacable à ces séances de répétition éreintantes où le fameux Whiplash – titre de Hank Levy que l’orchestre répète encore et encore – est constamment interrompu par un professeur pour qui « bon travail » n’est pas un compliment car il est toujours possible de faire mieux, plus proche de la perfection.

Whiplash © Daniel McFadden // Ad Vitam Distribution

La frénésie – on pourrait tout aussi bien parler de folie – de cet apprentissage tient en haleine tout au long du film, portée par les interprétations magistrales de Miles Teller, étonnamment crédible en batteur de haut niveau, et J.K. Simmons, excellent en professeur tyrannique dont les cruelles saillies rappellent celles du sergent instructeur Hartman dans Full Metal Jacket (1984). L’invitation à souffrir avec Andrew sur son instrument de torture fonctionne à merveille.

Du sang, de la peine, des larmes et de la sueur

Whiplash est un film dont le propos est moins la musique – pourtant omniprésente et filmée de façon éclatante – que la quête d’absolu et la peur qui en découle. Crainte de rater une mesure, de perdre le tempo et donc de décevoir, l’appréhension guide – et aveugle – Andrew, prêt à sacrifier jusqu’à se relation avec sa petite amie pour atteindre son objectif. Derrière la sueur, le sang et les larmes du jeune batteur, le cinéaste pose la question du sacrifice nécessaire pour accéder à l’excellence.

Whiplash © Daniel McFadden // Ad Vitam Distribution

Un but ultime qui pousse le professeur à maltraiter – pour son bien – le musicien qui accepte en retour les humiliations pour garder sa place au sein du groupe. Avec en fond une question qui reste en suspens : la création d’une œuvre mérite-t-elle autant d’abnégation et de souffrance ? Cette interrogation sur le prix à payer pour vivre une passion peut s’appliquer bien au-delà du domaine purement musical et offre au film une portée universelle qui touche juste.

Récompensé aux festivals de Sundance et Deauville – notamment par le prix du public –, Whiplash est un film intense qui marque par sa puissance et son énergie contagieuse. Un coup de fouet à ne surtout pas rater pour finir l’année en beauté.

Whiplash, réalisé par Damien Chazelle, États-Unis, 2014 (1h47)

Affiche du film "Whiplash"

Whiplash

Date de sortie
24 décembre 2014
Durée
1h47
Réalisé par
Damien Chazelle
Avec
Miles Teller, J.K. Simmons, Melissa Benoist
Pays
États-Unis